Rencontre avec Allan Heine

Arrivé à Nantes début décembre pour pallier au départ de Fred Bougeant, Allan Heine découvre la Ligue Féminine de Handball et la culture Française.

L’entraîneur danois a rapidement pris ses marques chez les Roses et une relation de confiance s’est vite instaurée avec son adjoint, Guillaume Saurina.

Sa bonne humeur contagieuse a conquis l’effectif nantais en soif de second souffle après un début de saison compliqué.

Partez à la découverte du nouvel entraîneur des Roses 🙂

Pour commencer, peux-tu nous présenter ton parcours ?

J’ai été joueur de handball jusqu’à mes 16 ans puis j’ai eu une grosse blessure, tout était détruit dans mon genou gauche et j’ai donc été écarté des terrains pendant 2 ans. C’était donc dur pour moi de revenir, mes copains ont beaucoup progressé pendant ces 2 ans, alors j’ai commencé à coacher. J’ai d’ailleurs coaché mes anciens partenaires, je ne pouvais pas les aider sur le terrain donc j’ai essayé de les aider d’une autre manière.

Mon début de carrière d’entraîneur s’est déroulé avec les garçons. J’ai démarré dans la ville où je suis né, puis je suis partie à Aalborg dans le nord du Danemark pour suivre la formation pour devenir entraîneur. J’avais 19 ans et j’entraîner une équipe masculine amateur dans laquelle un joueur avait 47 ans, je pouvais être son fils ! C’était amusant. Ensuite je suis allée dans un autre club où je me suis occupée du développement des sections jeunes (filles et garçons), j’étais encore assez jeune donc c’était parfois difficile. Puis je suis devenu assistant d’une équipe masculine qui évoluait en 2ème division.

 

Tes parents étaient sportifs peut-être ?

Oui ma maman et mon papa ont joué au handball pendant de nombreuses années. Ma maman a été championne du Danemark de handball en extérieur, sur herbe. Et mon papa aussi jouait dans une très bonne équipe. J’étais dans un gymnase une semaine après être né, j’étais probablement en train de pleurer mais j’y étais (rires), c’était donc naturel pour ma sœur, mon frère et moi de s’engager dans le handball. Mon frère est aussi entraîneur mais non professionnel et ma sœur était probablement celle qui avait le plus grand talent sur le terrain mais elle avait des mauvais genoux comme moi donc elle n’a pas pu jouer de nombreuses années.

 

Depuis quand souhaites-tu entraîner ?

Mon papa a été entraîneur de très nombreuses années et le club où il entraînait lui a dit que ça serait bien que j’entraîne également, donc j’ai commencé à 13 ans en tant qu’assistant. C’était dans mon esprit mais je voulais d’abord  jouer avant d’entraîner. C’est finalement arrivé plus tôt car j’aime le sport, j’aime découvrir le monde, grandir et devenir meilleur et je n’ai pas pu le faire en tant que joueur à cause de ma blessure donc j’ai dû trouver un autre moyen pour y arriver.

As-tu toujours entraîné des filles ?

Non, j’ai d’abord entraîné des garçons jusqu’à mes 20 ans. Puis un club féminin m’a proposé un super projet donc j’ai accepté car c’était une super opportunité pour moi. Je suis resté 11 ans là-bas ; j’ai d’abord été le manager du club, puis assistant de l’équipe 1ère. Le coach a été licencié, j’ai donc assuré la transition mais j’avais seulement 27 ans et je n’étais finalement pas prêt à avoir des joueuses professionnelles sous ma direction à ce moment là, donc je suis redevenu assistant pendant 2 ans et demi. Puis le nouveau coach a également été licencié et cette fois j’étais prêt. Le club m’a dont proposé d’être le nouveau coach principal et j’y suis restée 3 ans et demi. Ensuite le club a eu des problèmes financiers donc nous avons décidé d’arrêter de travailler ensemble. Et le jour d’après, je démarrais dans un autre club professionnel, il était loin de chez moi et de ma famille mais avons réussi à gérer cela et j’y suis resté 2 ans et demi. J’ai ensuite signé à Viborg pour 3 ans et demi.

 

Comment as-tu vécu ton arrivée en France et à Nantes en particulier ? Quelles sont tes impressions sur la ville ?

Je me sens bien ici ; jusqu’ici j’ai surtout vu le gymnase, mon appartement et l’hôtel où j’ai vécu avant d’avoir mon appartement, je n’ai pas encore pris le temps de vraiment visiter la ville mais de ce que j’ai déjà pu voir, c’est vraiment une jolie ville. Je me sens vraiment le bienvenu ici.

 

Connaissais-tu la France ?

Ce n’est pas la première fois que je viens en France, je suis venu en EHF Cup ainsi qu’avec l’équipe nationale ; mais venir en tant qu’entraîneur d’une équipe française c’est complètement différent.

 

Tu as été entraîneur de la sélection nationale danoise ?

J’ai été entraîneur de l’équipe nationale A pendant une semaine, en intérim, parce que le coach avait été licencié et que son remplaçant n’était pas disponible immédiatement. Donc avec un autre entraîneur,nous avons eu cette responsabilités le temps d’une semaine, à l’occasion de la Golden League qui était d’ailleurs organisée en France.

J’ai également été l’assistant puis l’entraîneur principal de l’équipe nationale B pendant environ 4 ans. Mais j’ai arrêté cet été car la fédération a décidé de ne plus avoir d’équipe B, ou en tout cas plus de la même façon, et il n’y a donc plus besoin d’entraîneur principal.

 

Cela n’a pas été trop compliqué pour toi d’arriver à ce moment là de la saison ?

C’est toujours difficile d’arriver en milieu de saison, d’autant plus en étant à l’étranger. Je ne comprends pas ce qu’elles disent donc même si des fois c’est mieux (rires) d’autres fois ça n’est pas pratique. Heureusement, c’est assez facile pour moi de lire le langage du corps. Et vous utilisez beaucoup votre corps pour communiquer en France donc des fois c’est assez facile de savoir ce qu’il passe même si je ne comprends pas la langue.

Malgré tout c’est toujours difficile d’arriver dans une nouvelle équipe. C’est important que les joueuses soient ouvertes d’esprit parce que si elles sont trop sur la défensive tu ne peux pas changer les choses en si peu de temps, c’est vraiment difficile. Une fois que tu as réussi à avoir la confiance de tes joueuses, c’est là où le vrai travail commence donc il est important de la gagner aussi vite que possible.

 

Quelle est la plus grande différence entre les joueuses françaises et les joueuses danoises ?

Je pense que si tu interroges les joueuses, elles diront quelque chose à propos de la course (rires). J’apprécie la puissance individuelle des joueuses françaises, elles sont  capables de réagir rapidement à la situation qui se présente à elles et ça c’est vraiment bien. J’aimerai garder ça et apporter davantage de course et de vitesse. Si on arrive à créer un juste mélange de ces qualités alors je pense que notre équipe sera vraiment forte.

 

Comment as-tu vécu ton 1er match à Mangin (le 12 janvier face à Fleury)? 

C’est toujours excitant de jouer son premier match à domicile quand on arrive dans un nouveau club parce que tu ne sais pas exactement à quoi t’attendre. J’ai vu de nombreux matchs de l’équipe en vidéo donc j’avais déjà une idée de l’ambiance, même si je ne pouvais pas la ressentir. De plus, je savais que c’était un match très important pour nous contre Fleury car le Championnat est très serré, surtout avec les play-offs, donc si nous gagnions contre Fleury c’était un pas important pour le reste de la saison. J’avais donc très hâte de jouer ce match et heureusement nous avons gagné d’un but et j’ai vraiment pu ressentir l’ambiance du public. Et je n’ose pas imaginer ce que ça peut être pour les play-offs, vu ce que nous avons créé face à Fleury.

 

Quels sont tes objectifs pour l’équipe aussi bien en Championnat qu’en Coupe de France ?

Je veux gagner tous les matchs et je pense que nous avons l’opportunité de le faire. Metz est probablement intouchable en ce moment, parce qu’elles sont vraiment à un très haut niveau et je ne pense pas qu’à l’heure actuelle une équipe française puisse les inquiéter.. Mais je pense que nous pouvons battre toutes les autres équipes mais pour ça nous devons jouer juste, être prêts et en forme.

 

Tu connaissais les joueuses avant de t’engager dans ce projet nantais ?

 Je les connaissais seulement parce que j’ai regardé beaucoup de vidéos avant d’arriver, mais je ne voulais pas que l’on me dise trop de choses au sujet des joueuses, même au niveau de leur personnalité, parce que j’aime me faire ma propre idée des gens. Par ailleurs, c’était important pour moi qu’elles démarrent toutes sur le même pied d’égalité car cela me permet de créer la meilleure équipe possible ; et la meilleure équipe n’est pas forcément l’équipe avec les meilleures joueuses. J’ai besoin d’avoir toutes les cartes en main et toutes les données pour créer la meilleure équipe possible, c’est mon travail en tant que coach d’afficher le meilleur 7 sur le terrain. Et pour que ça soit le meilleur, il faut qu’elles aient le sentiment d’être 8, même lorsque l’on fait des changements, ce sentiment doit rester le même. C’est le plus difficile.

 

Et comment es-tu arrivé à Nantes ? Comment avais-tu entendu parler du club ?

Je ne connaissais pas très bien Nantes mais je suivais le championnat français depuis quelques années : les résultats, les joueuses, j’ai regardé quelques matchs mais je n’ai pas retenu spécifiquement Nantes. C’est juste que je connaissais un petit peu le club car une joueuse danoise a joué ici il y a quelques années : Mia Moldrup. J’entraînais une équipe qui a beaucoup joué contre elle donc je la connaissais très bien, d’autant plus que nous venons de la même ville. Mais néanmoins, j’ai quand même dû me renseigner pour en savoir davantage sur le club, l’équipe et la ville. Lorsqu’un agent de joueuse est venu me demander si je pouvais être intéressé par le NAHB, ma première réponse fut non car je n’étais pas prêt à quitter le Danemark. Finalement après discussion, j’ai envisagé de venir pour 6 mois avec une option de prolongation d’un an. Cette option m’a aidé à prendre ma décision, car c’était trop dur pour moi de décider au mois de novembre de partir pour 1 an et demi. Suite à ça, j’ai eu une réunion avec Arnaud (Ponroy, le Président du club), puis j’ai parlé avec Guillaume (Saurina). C’était très important pour moi de discuter avec Guillaume car j’allais travailler avec lui en arrivant ici et si je ne pouvais pas travailler avec lui, alors je ne serais pas venu car j’aurais été tout seul en France. Après tout ça, nous avons pu établir mon contrat.

 

Quelles ont été tes premières impressions sur l’équipe et ta collaboration avec Guillaume ?

Je pense que nous avons une super équipe, mais nous avons eu beaucoup de blessées. Je suis arrivée en décembre et peu de temps après ça Kali s’est blessée, Karich aussi, Barbosa était déjà en arrêt avec sa grossesse, Eli Chavez était out avec ses croisés donc, cela faisait beaucoup de joueuses indisponibles et ce n’était pas facile au début de savoir quoi faire ni quoi dire. Mais à côté de ça, les autres étaient prêtes physiquement et dans ce cas c’est un métier fantastique, il suffit juste de travailler dur et croire que nous pouvons faire quelque chose ensemble.

En ce qui concerne ma collaboration avec Guillaume, je pense qu’elle est vraiment très bonne ; je suis un peu surpris que l’on est réussi à trouver une telle entente aussi rapidement. Quand je parle avec lui de tactique et technique, ou quand on prépare les matchs, c’est assez marrant parce que si nous prenons des notes sur quelque chose, nous écrivons souvent la même chose chacun de notre côté. Nous pensons pareil et ça rend les choses plus faciles, surtout quand un match est serré, nous n’avons pas besoin de discuter longtemps et sommes d’accord rapidement. Et c’est ce que j’ai ressenti tout de suite quand j’ai rencontré Guillaume ; je me suis dit que c’était un gars avec qui j’aurais envie de boire un café. Certaines personnes sont de chouettes personnes mais « un café ? Non merci » (rires). Nous passons beaucoup de temps ensemble et nous apprenons encore à nous connaître de mieux en mieux. Je pense que c’est vraiment important, quand tu as travailles avec une telle promiscuité avec quelqu’un, de se comprendre l’un et l’autre, mais pas seulement en superficie. C’est différent avec les joueuses, mais ici dans le bureau je pense que c’est important aussi de bien s’entendre, de rigoler, de blaguer pour faire régner une bonne ambiance. Parce que des fois le travail est dur et tu as besoin de soutien.

 

Quand tu n’es pas au hand, quels sont tes hobbies ?

J’aime jouer au golf, en fait j’adore tous les sports mais plus particulièrement le golf quand je suis chez moi. Mais ici, comme ma famille n’est pas là, après ma journée, je me prépare mon dîner, je travaille encore un peu et je vais me coucher.  A vrai dire, en ce moment, je ne fais pas grand-chose d’autre que du handball (rires). Mais l’été par exemple, je cours beaucoup, il y a des plages presque partout au Danemark donc j’adore y aller. Avec ma famille, nous aimons faire du camping. C’est parfait pour des vacances en famille  parce que les parents peuvent se reposer et les enfants peuvent trouver d’autres enfants avec qui jouer. J’adore le football aussi bien sûr, j’y ai joué énormément quand j’étais jeune.

 

Place à quelques questions sur les joueuses ; selon toi, dans l’équipe, qui est :

La plus travailleuse ? Je ne peux choisir, elles travaillent toutes beaucoup, elles font ce qu’on attend d’elles mais on essaye de les pousser encore plus loin bien sûr pour être encore meilleures. Selon moi ce n’est pas seulement une joueuse qui travaille le plus, c’est l’équipe. Nous devons être unis, pas seulement les filles sur le terrain mais aussi toute l’équipe autour du terrain, les coachs, le staff. Nous devons être vraiment soudés et si nous le sommes nous irons jusqu’au bout. Nous ne gagnerons peut-être le trophée mais nous gagnerons dans notre esprit. Donc je ne regarde pas vraiment une individualité en particulier.

La plus drôle ? Je ne comprends pas toujours ce qu’elles racontent mais je peux observer pendant nos déplacements que Léa fait beaucoup rire les autres. Je ne sais pas si elles rigolent avec elle ou si elles rigolent d’elle (gentiment bien sûr) mais en tout cas elle crée une bonne ambiance dans le groupe.

La plus râleuse ? Tout le monde (rires). Je pense que c’est une spécialité de la France, si tu ne sais pas quoi faire, tu peux toujours te plaindre (rires). Mais finalement, ce n’est pas très différent au Danemark, nous nous plaignons souvent aussi. Au début, je n’étais pas habitué à ça, je ne comprenais pas ce qu’il se passait et maintenant je préfère en rigoler. Ça ne me gêne que l’on se plaigne et que l’on donne son opinion mais se plaindre pour se plaindre, j’en rigole.

La plus bavarde ? ça pourrait être Léa… J’essaye de me remémorer nos déplacements et je me souviens surtout de Léa, car elle était en train de parler de maquillage et elle avait un certain point de vue, c’était assez marrant d’assister à cette discussion, elle était vraiment active dans ce débat.

 

Le mot de la fin pour les supporters du NAHB :

SVP venez aux matchs ! Je pense que si nous avons gagné contre Fleury c’est aussi grâce à eux, ils nous ont poussés et je pense que s’il n’y avait pas eu cette ambiance, cela aurait été dur de gagner et on aurait peut-être même perdu. Donc attrapez vos voisins et les voisins de vos voisins et venez à Mangin (rires) !

Je peux promettre que nous vous donnerons une bonne énergie et des sourires sur vos visages !

Crédit Photo : Corentin Pingeon

 

MERCI ALLAN !
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